La gestion de la morue du Nord continue d’être un échec, alors que Pêches et Océans Canada reconduit sa hausse de quota nocive établie l’an dernier

Press Release Date: July 9, 2020

HALIFAX— Pêches et Océans Canada (MPO) vient de publier son quota annuel pour la pêche de la morue, une espèce dangereusement épuisée ; ainsi, le quota de 12 350 tonnes établi en 2019 est maintenu, ce qui s’avère très nocif pour l’espèce. Le MPO a augmenté de 30 % le quota de capture l’an dernier, malgré les recommandations scientifiques de réduire la capture le plus possible. Ce quota élevé pour la morue du Nord est encore plus dommageable, car il ne tient pas compte des prises par pêche récréative à Terre-Neuve. Par ailleurs, le MPO n’a toujours pas terminé son plan de rétablissement pour la morue du Nord, près de trois décennies après l’effondrement de l’espèce.  

Oceana Canada milite pour un retour à un quota responsable de 9 500 tonnes, qui tiendrait aussi compte de la pêche récréative. 

« Cette décision ne corrige en rien la trajectoire nocive empruntée par le MPO l’an dernier. En gardant ce quota à un niveau insoutenable, nous continuons à exercer une pression irresponsable sur une population de poissons qui se trouve profondément en zone critique, » affirme le Dr Robert Rangeley, Directeur des sciences pour Oceana Canada. « Ce faisant, le gouvernement va à l’encontre des recommandations scientifiques et de ses propres politiques visant le rétablissement des populations épuisées de poissons, comme le souligne la nouvelle Loi sur les pêches entrée en vigueur l’an dernier » ajoute le Dr Rangeley. « Cette décision survient à la suite d’une autre décision dangereuse du MPO ; plus tôt cette année, le quota de capture du capelan a été établi à presque 20 000 tonnes. Il s’agit d’une autre espèce gravement épuisée, qui constitue une importante source alimentaire pour la morue. » 

Lorsqu’une population de poissons comme la morue se retrouve dans la zone critique, c’est qu’elle subit des dommages graves ; et la politique du MPO prévoit l’application prioritaire de mesures de conservation. En l’absence d’un plan de rétablissement, il n’y a pas de parcours clairement établi, pas d’objectif, ni d’échéancier pour ramener une population épuisée à un niveau sain ; et aucune orientation pour en assurer une gestion responsable.  

Les populations de morue du Nord se sont effondrées au début des années 1990, entraînant un ralentissement économique. Les communautés côtières subissent une situation similaire aujourd’hui, alors que toute l’industrie de la pêche a été affectée par la pandémie de COVID-19. Plus tôt cette année, le gouvernement canadien a offert un soutien économique à l’industrie de la pêche et des produits de la mer. En plus de ces mesures, le gouvernement doit investir à long terme dans la gestion durable des populations de poissons, afin de s’assurer que les océans resteront une source abondante de nourriture et de revenu pour les communautés à l’avenir. 

« Les facteurs de stress qui pèsent sur le secteur de la pêche, tels que les conditions environnementales changeantes dues aux changements climatiques et l’instabilité économique causée par la pandémie mondiale, démontrent à quel point une bonne gestion de la pêche est primordiale pour protéger notre avenir, » explique le Dr Rangeley. « Maintenant plus que jamais, nous devons prendre soin de nos poissons. Ce faisant, nous protégerons nos communautés et nos entreprises qui dépendent de l’abondance et la santé des océans. En ce qui concerne la morue du Nord, ceci signifie garder au minimum la pression exercée par la pêche tant que la population sera dans la zone critique, et publier un plan de rétablissement qui respecte les normes internationales. »  

En 2017, le MPO s’est engagé à publier un plan de rétablissement pour la morue du Nord d’ici mars 2019 ; pourtant, ce plan est encore attendu. Une étude sur l’économie de la pêche, commandée par Oceana Canada en 2019, a démontré qu’une pêche à la morue pleinement rétablie pourrait créer jusqu’à 16 fois plus d’emplois et offrir une valeur cinq fois supérieure à celle d’aujourd’hui, en 10 ans à peine.  

Contact: Kathleen Munro, Pilot PMR, kathleen.munro@pilotpmr.com, 902-789-3165. Lien vers la trousse média.

Établie en 2015, Oceana Canada est une organisation caritative indépendante qui fait partie de la plus grande organisation internationale vouée exclusivement à la conservation des océans. Les efforts de sensibilisation d’Oceana Canada ont notamment contribué à mettre fin au commerce des nageoires de requins, faire du rétablissement des populations de poissons épuisées une obligation légale, améliorer la façon dont les pêches sont gérées, et protéger les habitats marins. Nous travaillons avec la société civile, les universitaires, pêcheurs, populations autochtones et le gouvernement fédéral afin d’aider les océans canadiens à retrouver leur santé et leur abondance d’autrefois. En assurant la restauration des océans canadiens, nous fortifierons nos communautés, profiterons de plus grands avantages sur les plans économique et alimentaire, et protégerons notre avenir.

Quelques faits sur la morue du Nord 

• Pendant des siècles, la morue de l’Atlantique a soutenu une pêche massive, a été le moteur de l’économie et a nourri des millions de personnes. Au cours des années 1990, la plupart des stocks de morue se sont effondrés dans le Canada atlantique.

• Aujourd’hui, la plupart des populations restantes, dont la morue du Nord, sont dans la zone critique et sont considérées comme menacées par le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC). Ces populations sont moins résistantes aux facteurs tels que les changements climatiques, la nourriture moins disponible et la prédation. 

• Des décennies après son effondrement, la morue du Nord n’a toujours pas de plan de reconstitution pour assurer une gestion durable de la pêche et soutenir le rétablissement de sa population dans la zone saine.

• Bien que la morue du Nord soit officiellement sous moratoire, le total des débarquements déclarés était de 13 023 tonnes en 2017, 9 496 tonnes en 2018 et 10 559 tonnes en 2019. Actuellement, il n’est pas obligatoire de déclarer les débarquements par pêche récréative, mais les estimations tirées du marquage de la morue en 2020 indiquent que les captures se sont élevées en moyenne à 1 900 tonnes par an entre 2016 et 2019.

• Au début de 2019, la biomasse du stock reproducteur de morue du Nord se situait à moins de la moitié du point de référence limite, soit 48 %, qui est le niveau auquel la population quitterait la zone critique pour entrer dans la zone de prudence. 

• Malgré que la biomasse de morue ait augmenté ces dernières années (2012-2016), le recrutement, soit l’atteinte d’une certaine taille ou d’un certain stade de reproduction, reste relativement faible, avec une moyenne récente de 20 % de la période précédant l’effondrement.

• Actuellement, la morue du Nord atteint sa maturité à l’âge de cinq ans et peut vivre jusqu’à 26 ans, mais on voit peu de poissons de plus de 15 ans aujourd’hui. 

• L’avenir des sources alimentaires de la morue du Nord, incluant le capelan et la crevette, est également incertain. La famine est une cause importante de mortalité naturelle pour la morue.

• À ce jour, 33 stocks de poissons sont dans la zone critique au Canada ; et seulement six d’entre eux ont des plans de rétablissement. De ceux-ci aucun ne respecte les pratiques exemplaires mondiales en la matière, notamment en incluant des échéanciers et des objectifs.  

• Le Canada se trouve à un moment critique pour la gestion de ses populations de poissons. Il existe une excellente opportunité de rétablir les populations épuisées et l’urgence n’a jamais été aussi grande, l’océan étant touché par des menaces telles que les changements climatiques, la surpêche et la pollution.

• Si nous agissons maintenant, et nous engageons à gérer nos ressources marines de façon durable, le rétablissement des populations de poissons au Canada peut être l’accomplissement de notre temps.